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L’après-covid-19 : Dialogue avec la jeunesse : les nouveaux défis dans le monde du travail de demain

Du 26 au 29 octobre 2023 a eu lieu à Paris / France un séminaire sur « L’après-covid-19 : Dialogue avec la jeunesse : les nouveaux défis dans le monde du travail de demain », organisé par GEPO (Groupe Européen de Pastorale Ouvrière), en coopération avec EZA et financé par l’Union européenne. 35 représentants d’organisations de travailleurs de Belgique, d’Allemagne, de France, d’Espagne, du Luxembourg, d’Italie et du Portugal ont participé au séminaire.

Le GEPO a fait le constat dans les séminaires précédents d’un déficit de prise en compte des jeunes travailleurs dans le dialogue social. Le GEPO peut être un lieu d’expression et d’écoute de la parole des jeunes travailleurs européens grâce à la présence de jeunes responsables de la JOC en son sein. Il s’agit aussi de permettre aux jeunes de participer à tous les niveaux du processus, leur ouvrir à plus de responsabilités et à plus de délégations, apprendre avec eux et expérimenter le temps long dans l’action. 

Le GEPO, permet l’intergénérationnel avec la présence des jeunes et les anciens de la pastorale ouvrière. 

Le Covid-19 a impacté toutes les couches de la société dans la manière de communiquer avec les autres. Les jeunes n’ont pas été épargnés. Ils ont été impactés par toutes les crises récentes (le covid-19, la guerre en Ukraine et la crise de l’énergie, la situation des migrants dans l’Union Européenne) par l’incertitude que cela projette sur l’avenir. 

Faisant le constat que les jeunes accèdent de plus en plus tard à un emploi stable, qu’ils font partie des travailleurs les plus précarisés, il est essentiel de voir comment cela impacte le dialogue social. 

La partie constat, VOIR, s’est organisée autour de 3 temps 

        -  Le tour d’horizon de situations des jeunes travailleurs 

Le tour d’horizon de situations des jeunes travailleurs perçu par les mouvements de la JOC nous a fixé les thèmes de travail ; à savoir : La précarité du travail pour les jeunes, le non accès au logement, la justice du genre ou l’égalité des chances, la précarité dans la formation, la barrière des langues, la consommation et les conditions de travail, le changement climatique, la question migratoire et le racisme. 

À partir de son positionnement en tant que sociologue, Mme Léa LIMA, professeure de sociologie au Conservatoire National des Arts et Métiers nous a proposé quelques clés de lecture pour comprendre la situation des jeunes. 

Elle a souligné l’universalité des thématiques travaillées par les jeunes, les problématiques traitées ne concernent pas seulement les jeunes, l’inégalité salariale est une réalité qui concerne tout le monde, les mauvaises conditions de travail et la sécurité de l’emploi et la sécurité au travail. 

Contrairement à ce qu’on pense, les jeunes ne remettent pas en cause la centralité du travail. Et dans ce contexte des crises, le rôle des organisations des jeunes est de construire avec eux la rationalité du futur. 

  • La rencontre d’expérience concrète 

Cette construction de la rationalité du futur, nous l’avons vue et touchée dans l’expérience concrète d’une entreprise qui propose aux chômeurs de longue durée une insertion et une intégration dans le monde du travail. Il s’agit de « 13 Avenir », une Entreprise à but d’Emploi qui s’inscrit dans l’expérience Territoire zéro chômeur de longue durée. Elle conjugue une implantation dans un quartier de PARIS en proposant ces services aux habitants et permet un emploi stable à des chômeurs. 

Une autre partie des participants à Manon Belgrand responsable du secteur jeunes au secours catholique Caritas France au sujet des groupes Young Caritas de France. Ceux-ci regroupent de jeunes qui s’adressent au secours catholique pour un service, une aide mais aussi de jeunes bénévoles. Ensemble ils décident d’actions. Pour des jeunes migrant cela est une voie d’intégration. L’échange c’est posé la question de la concurrence entre organisation de jeune et a conclu que si cette concurrence existe elle n’est pas malsaine, elle permet à des jeunes d’accéder au bénévolat associatif qu’ils soient centrés sur une action répondant à leur situation ou sur une action orientée vers le service des plus pauvres.  Tous découvrent une action sociale qui participe au dialogue social quand elle est relayée auprès des décideurs. Les participants étaient aussi d’accord pour constater des engagements pour des durées plus courtes. La transmission de l’expérience est importante pour les mouvements mais elle ne doit pas être un carcan qui enferme dans une forme d’organisations ou d’actions. 

  • Une table ronde autour de jeunes acteurs 

La table ronde a réuni Miguel Schelck responsable de la section jeune du syndicat FGTB Bruxelles, Jean-Philippe Rouxel du secours Catholique Caritas France, Directeur de la Coordination des Régions et des Délégations, et Sybille Douvillez, jeune secrétaire générale adjointe du mouvement place publique, responsable des mobilisations. 

Leurs organisations créent des lieux de partage des besoins concrets, des aspirations, mais ils sont un apprentissage du vivre ensemble et de ses talents. Les modes d’action sont souples à l’impact rapide avec du sens. Ces lieux permettent le partage de valeurs et de vivre la relecture. Cela débouche parfois sur des plaidoyers communs. 

Des structures sont spécifiques pour les jeunes travailleurs ou étudiants, entre eux et pour eux. S’ils s’intègrent aussi aux luttes des travailleurs ils vivent aussi des luttes spécifiques (antiracisme, précarité menstruelle …). Pour les travailleurs de l’économie de plate-forme le choix est fait d’aller vers eux par des structures adaptées comme la maison des livreurs. 

Les jeunes s’engagent sur des causes, du concret via des structures adaptées aux jeunes avec confiance. Il est difficile de rencontrer les plus précaires, ces jeunes sans filet de sécurité. Cela abime la démocratie. Il faut montrer que les jeunes des classes populaires ont leur place et effacer le sentiment d’abandon. Les jeunes constatent qu’on leur demande de faire leur place dans la société. Ils pointent aussi le besoin de se former sur le flux d’information qu’ils reçoivent et le besoin de l’accompagnement par de la formation de ce qu’ils veulent faire. 

Les intervenants abordent cette année électorale européenne avec plusieurs préoccupations : le désintérêt d’une partie des jeunes vis-à-vis de la politique, un bilan social de l’Union Européenne qui a privilégié le libre échange au progrès social. Ils lui demandent de développer le social dans l’intérêt des travailleurs et de promouvoir un revenu minimum pour tous, dont les jeunes. Les jeunes sont aussi sensibles à la situation des jeunes migrants qu’ils soient en situation régulière ou non. 

Le JUGER à partir de l’enseignement social de l’Eglise 

L’approfondissement proposait de voir l’apport de l’enseignement social de l’Eglise du point de vue spécifique des jeunes dans les encycliques « Laudato Sì » et de « Fratelli tuti », et les discours aux mouvements populaires lors des rencontres de 2014, 2015 et 2016. 

Dans « Laudato Sì » un des signes de la fécondité du lien entre justice et protection de l’environnement se marque dans la façon d’envisager l’avenir. C’est une question qui concerne les jeunes en premier lieu. 

C’est le même regard qui détruit la nature et qui « tue » l’autre, un regard qui refuse de considérer pour elle-même la nature, sa beauté et sa grandeur, qui renonce à reconnaître les humains comme sœurs et frères. 

« Fratelli tutti », publiée en 2020, a mis l’accent sur le « bien commun » un des fils conducteurs de l’Enseignement social de l’Eglise. Pour le pape François, la parabole du Bon Samaritain reste une source d’inspiration pour orienter nos comportements et le sens de notre vie. L’hospitalité, l’amour universel ouvrent vers un monde de partenaires. 

Les discours aux mouvements populaires orientent vers quoi se centrer pour bien réfléchir et agir ? 

Le point de départ du pape François, ce qui va déterminer la suite, c’est de placer au cœur de ses préoccupations les personnes, les travailleurs en situations de fragilité et de précarité, ceux qui sont victimes de multiples exclusions et d'injustices dans chaque activité de travail, dans chaque quartier. Le système global a imposé la logique du gain à n’importe quel prix sans penser à l’exclusion sociale ou à la destruction de la nature. 

Le cœur de la réponse repose sur trois axes : au lieu du projet-mur de l’argent, la réponse comporte les 3 T : terre, travail, toit. La terre et donc l’agriculture ; le toit, ce qui signifie le logement et aussi l’urbanisme ; le travail avec le refus de la culture du rebut et du dieu-argent. Ces axes exigent la paix et l’écologie. 

Chacun est invité à agir pour le bien de tous et avec tous et les pauvres en particulier. La juste distribution des fruits de la terre et du travail humain n’est pas de la pure philanthropie. C’est un devoir moral ; un autre devoir est de se tenir loin de la corruption. 

À l’inverse de la technocratie qui isole, Dieu nous a unis à toutes ses créatures. La vie humaine ne se conçoit pas sans les autres créatures dans un respect sacré, tendre et humble. Au lieu d’un humain autonome, tout-puissant et illimité, nous nous repensons plus humbles et plus riches. 

Résultats du séminaire 

-Par la tenue de ce colloque en intergénérationnel nous avons montré que des enjeux pour le dialogue social. 

-Marcher ensemble et de co-construire. Pour cela, il faut impliquer. Or, quand les gens sont en situation de précarité, ils voient à court terme. Comme responsable, nous sommes des jeunes privilégiés et nous savons déjà ce que veut dire s’impliquer. Nous devons donc témoigner de l’intérêt de la participation au dialogue social. 

-Enjeu de maintenir au sein de l’UE une vision large du dialogue social pour ne pas le limiter aux relations patronats/syndicats. 

-Prendre en compte le questionnement des jeunes dans les processus de formation pas seulement comme un problème (la génération Z avec laquelle on ne sait pas quoi faire) mais comme source d’une interrogation plus globale sur la société. 

-Avoir plus d’échange avec les autres pays. Car, c’est important de maintenir les liens avec les jeunes : multiplier les contacts et élargir les cercles. 

-Aborder les relations en termes de fraternité. Le défi est comment on se fait frère quand on a plus de 30 ans et qu’on veut se faire frère des jeunes adultes. Cela passe par la langue des jeunes. 

-La possibilité de partager certaines situations, comme les questions de migrations et voir quelles sont les propositions, les feed-back que l’on reçoit des autres. Nous sommes heureux de ramener des idées qui viennent d’ailleurs. 

-Faire de nos conclusions une parole publique. Elle le sera déjà par la diffusion de ce rapport par EZA. 

Résultats des discussions, groupes de travail, ateliers etc. 

Ce que les participant retienne pour une un travail avec des jeunes des adulte plus âgés : 

  • Toujours impliquer les jeunes pour aborder ces thèmes. 

  • Rencontres intergénérations. 

  • Rassembler des points de vue différents. 

  • Aborder les jeunes avec une méthode : Questionnement / que disent les copains-copines / que faire. 

  • Permettre aux jeunes de participer à tous les niveaux du processus. 

  • Ouvrir à plus de responsabilités et plus de délégation. 

  • Apprendre à expérimenter le temps long dans l’action. 

  • Ecouter les jeunes tant au plan individuel qu’au plan collectif (comme organisation). Nous avons besoin de voix organisée des jeunes. 

  • Confier aux jeunes des responsabilités en acceptant qu’ils soient des débutants – pour ne pas faire le même que nous. 

  • Important qu’ils portent les responsabilités au même niveau que nous, sans paternalisme. 

  • Des solutions bonnes pour tous. 

  • Aborder cela d’un point de vue européen. 

  • Il faut chercher le lien entre nous et pas ce qui nous sépare. Écouter : l’un et l’autre. 

 

Des décisions 

 

La première décision a été celle de l’intégration de jeunes actifs dans la préparation et pendant le colloque dans les instances du GEPO. 

La deuxième est de promouvoir les liens, les échanges entre les participants en dehors des colloques mais aussi avec des institutions appropriées. 

Nous devons aussi mettre en œuvre une réflexion sur comment chacun peut se sentir membre du GEPO et voir ce qu’il peut apporter dans la conduite des mouvements la formations des responsables et quel modèle d’organisation que nous voulons être : une organisation qui pilote des actions commune ou une plateforme qui profite d’une tradition et des contacts qui met en présence des gens qui considèrent que des contacts avec des gens d’autres organisations, d’autres cultures et d’autres langues peuvent être féconds et peuvent nous permettre de dépasser les habitudes paresseuses et que, entendre d’autres logiques de pensées nous permet d’évoluer. Cela implique de reprendre contact avec des mouvements impliqués dans les pastorales ouvrières et populaires en élargissant les pays concernés. 

Nous avons décidé de reconduire un colloque en 2024 en Allemagne. 

Pour le thème nous sommes repartis du constat de la « grande démission » mais aussi des aspirations de la génération Z à concilier vie privée et vie au travail en considérant l’organisation de l’une et de l’autre mais aussi la cohérence du sens, que les travailleurs jeunes ou pas, donnent à l’une ou l’autre.