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Renforcer la démocratie par l'égalité et la justice sociale

Du 23 au 26 novembre 2020, un séminaire portant sur « Renforcer la démocratie par l'égalité et la justice sociale », organisé par la CNS « Cartel Alfa »/F.N.CORESI (Confederaţia Naţională Sindicală « Cartel Alfa »/Fundaţia Naţională CORESI), avec l’aide financière d’EZA et de l’Union européenne, s’est déroulé à Olanesti/Roumanie.

Des représentants d’organisations de travailleurs venus de Roumanie, de Bulgarie, de Chypre, de Malte, de France, de Belgique, d’Allemagne, d’Albanie et de Suisse (OIT-ACTRAV, en tant qu’invités) ont assisté au séminaire.

Dans la partie introductive, M. Bogdan Iuliu HOSSU, vice-président d’EZA, a souligné qu’EZA regroupait soixante-treize organisations de travailleurs de trente pays européens, basées sur les valeurs sociales chrétiennes.

Au cours de l’événement, le thème principal de la discussion était le renforcement de la démocratie par l’égalité et la justice sociale, le sujet de la discussion étant donc : la démocratie, la justice sociale et l’égalité des chances.

Sigrid Schraml, secrétaire générale d’EZA, a souhaité la bienvenue à l’auditoire, souligné l’importance des questions à débattre et déclaré l’objectif d’EZA et de la Commission européenne (CE) en termes de conclusions de chaque séminaire. La lettre commune rédigée à la fin du séminaire de l’année dernière par l’OIT, EZA et Cartel Alfa sur l’avenir du travail, qui a été présentée à la CE et qui a ouvert la voie à de nouveaux débats nationaux et internationaux, est un exemple positif.

La discussion a amené à débattre d’une série de projets législatifs qui ont été lancés récemment, à savoir : inspirés par la loi française et qui consistent à encourager la participation des travailleurs à la prise de décision, à les impliquer dans le conseil d’administration, à encourager les entreprises à partager une partie des bénéfices avec les salariés (entre 5 et 7%).

Les collègues bulgares ont présenté les effets du COVID 19 sur le marché national du travail et les mesures prises par le Gouvernement. Ils ont montré que les taux de chômage avaient augmenté, que le nombre d’emplois avait diminué et que les emplois nouvellement créés étaient saisonniers, pour une durée déterminée et mal rémunérés. En Bulgarie, les organisations de travailleurs luttent contre la corruption et les inégalités sociales, le manque de solidarité, mais aussi l’application défectueuse des principes démocratiques.

  • Les sujets abordés au cours du séminaire étaient les suivants :
  • la démocratie et les changements sur le marché du travail ;
  • la qualité de l’emploi ;
  • comment assurer l’égalité des chances sur le marché du travail ? ;
  • la discrimination à l’égard de l’emploi et sur le lieu de travail ;
  • la nécessité d’investissements sociaux : des prestations et des services sociaux intégrés ;
  • la politique du salaire minimum dans les États membres.

Au cours du séminaire, on a souligné que, ces derniers temps, la qualité des emplois avait diminué au niveau européen. Un salarié qui, bien qu’employé, a un revenu disponible inférieur au seuil de pauvreté de 60 % du revenu disponible national équivalent moyen, est pauvre. La part des salariés roumains menacés de pauvreté a diminué de 2,4 % entre 2008 et 2018, mais elle est restée la plus élevée de l’Union européenne : près d’un salarié sur sept en Roumanie (15,3 %) était menacé de pauvreté en 2018, selon les données de la CE. C’est aussi l’une des principales raisons de la migration des travailleurs, qui n’ont pas envie de travailler dans leur pays. La moyenne européenne de la part des salariés menacés de pauvreté est d’environ 1 sur 10.

D’autre part, la Roumanie se classe au deuxième rang de l’UE en termes de croissance de la productivité, après l’Irlande, étant donné que la croissance de 2010 à ce jour est de 42,6 %. Le concept selon laquelle le travail assure le bien-être n’est pas toujours applicable à la Roumanie, bien que les données statistiques montrent que, ces dernières années, la productivité des employés a considérablement augmenté.

Les présentations en ligne des intervenants de Chypre et de Malte ont bénéficié d’un réel intérêt et ont montré qu’il existait également des inégalités sociales, des problèmes sur le marché du travail. On a beaucoup discuté du fait que l’évaluation des emplois était subjective et dépendait de nombreux facteurs. La qualité du travail comprend plusieurs éléments, pondérés différemment, d’une personne à l’autre, tels que : le salaire, les conditions de travail, l’appréciation au travail, l’équipe, les forfaits d’assurance offerts, les primes, etc.

L’affectation par le Département du travail du Ministère du travail à la recherche, à l’étude et à la correction de la discrimination dans les textes des conventions collectives a été le succès important de DEOK Chypre. Dans le cadre du projet, les conventions collectives de Chypre ont été consolidées et numérisées.

De nombreuses études de cas menées sur les formes discriminatoires présentes dans les relations professionnelles sur le marché du travail révèlent ce qui suit :

  • la discrimination fondée sur le genre est réalisée en particulier du point de vue de la rémunération, des différences entre les femmes et les hommes occupant le même poste, ainsi que de la promotion à des postes de direction, un aspect légèrement plus équilibré ces derniers temps, mais encore loin du principe de l’égalité de traitement ;
  • l’accès aux postes de direction et aux emplois dans les institutions publiques, les critères de compétence et d’admissibilité, l’organisation de concours de recrutement ;
  • les résultats de la prévention et de la lutte contre la discrimination à l’égard de l’emploi et sur le lieu de travail sont, d’un point de vue statistique, très peu nombreux ;
  • la réadaptation et la réintégration des salariés qui ont subi diverses formes de discrimination sont extrêmement faibles. Ici, les principaux résultats surviennent en termes d’activité syndicale et de participation à la protection des droits des salariés. Au niveau individuel, la situation est devenue presque critique, seulement en termes d’exceptions.

Les présentations sur l’égalité des chances sur le marché du travail roumain, en particulier pour le secteur de la technologie de l’information, les jeunes et les femmes, ont mis en évidence les problèmes auxquels ces catégories d’individus étaient confrontées. L’écart salarial est également important en Roumanie, plus important que dans d’autres États membres, et toutes les politiques qui ont tenté d’être appliquées n’ont pas abouti. 

Les présentations tenues ont montré que la Roumanie vieillissait rapidement. La population âgée de soixante-cinq ans et plus atteindra 31 % de la population du pays d’ici 2050, mais avec une légère tendance à la baisse. La même tendance avec des variations d’un pays à l’autre est valable dans toute l’Union européenne. Le vieillissement s’accompagne d’une réduction de la population qui, dans le cas de la Roumanie, a à la fois des causes liées au mouvement naturel, mais surtout à la migration.

Une population plus petite entraînera une diminution du potentiel productif, bien que cette réduction puisse être partiellement compensée par des augmentations de productivité.

On a noté que la population roumaine se stabiliserait d’ici au milieu du siècle, à environ 13 à 15 millions d’habitants. Toutefois, autour de ce chiffre, la Roumanie sera un pays sous-peuplé et extrêmement vieillissant, avec un potentiel productif considérablement réduit, en particulier compte tenu du maintien de la structure actuelle par les branches et les secteurs d’activité.

Dans la structure de l’emploi, les secteurs non concurrentiels et faiblement productifs sont dominants. On trouve près de 30 % de la population active dans le secteur primaire, 28 % dans les secteurs des services à faible valeur ajoutée et environ 8 % dans la construction, soit un total de 61 % dans les secteurs procycliques ou à faible valeur ajoutée. L’administration, la formation et la santé couvrent environ 14 % de la main-d’œuvre, mais pas moins de 28 % de toutes les personnes ayant fait des études supérieures. Cette structure soulève des questions de viabilité du système de retraite et non de dispositions législatives concernant les pensions publiques.

Il s’est avéré que, dorénavant, pendant presque un demi-siècle, les dépenses consacrées aux pensions dans le système public resteront à peu près au même niveau relatif (exprimé en pour cent du PIB) que le niveau actuel. Les dépenses totales liées au vieillissement de la population sont susceptibles d’enregistrer une augmentation, mais elles seront également modestes, du moins en termes relatifs (par rapport au PIB nominal). Cela peut sembler quelque peu rassurant et même réconfortant, mais en fait, cela montre que le taux de remplacement du revenu du travail par celui de la retraite restera, dans l’ensemble, très modeste.

Par conséquent, cela montre que la structure par branches et par secteurs restera presque inchangée. Certes, il y aura des gains de productivité en raison des progrès techniques, mais en fin de compte, cette structure ne pourrait soutenir qu’une main-d’œuvre majoritaire avec des revenus modestes. Nous devrions mettre l’accent sur le développement du secteur de la recherche, du développement et de l’innovation, des infrastructures et des technologies modernes, de la numérisation et du « verdissement » et, bien sûr, en parallèle, le développement du capital humain pour le soutien.

Il convient toutefois de noter que les mesures prises dans le seul domaine de l’emploi ne peuvent produire que des effets modestes et à très court terme. Les effets à long terme ne doivent être attendus que par la mise en œuvre de politiques économiques sectorielles dans lesquelles les attributions des fonds structurels et d’investissement européens doivent être investies.

Les experts invités au panel sur le salaire minimum européen ont montré que celui-ci pouvait être une étape importante dans l’accélération de la vitesse de convergence au sein de l’Union européenne. Bien que plusieurs États s’opposent à l’initiative de la CE, en particulier en raison de leurs propres systèmes d’établissement du salaire minimum fondés sur la négociation collective, la grande majorité des États membres soutiennent cette initiative. La Confédération des syndicats européens s’est déclarée favorable à la réglementation dans ce domaine et estime que la deuxième partie de la proposition, qui concerne le renforcement du cadre de négociation collective au sein de l’État membre, était également très importante en ce qui concerne la réduction du pouvoir de négociation des partenaires sociaux observée ces dernières années. Le salaire minimum en Europe peut également constituer une réduction significative du phénomène négatif connu sous le nom de dumping social qui affecte le marché unique.

Les participants ont identifiés plusieurs actions futures :

  1. Planification et organisation de séminaires pédagogiques équivalents au contenu de la législation avec la participation des partenaires sociaux.
  2. Promotion de cours pédagogiques en faveur d’une négociation adéquate en matière d’égalité salariale, de sorte que l’évaluation des emplois soit un objectif.
  3. Examen des méthodes de détermination du montant exact des salaires afin d’éliminer la discrimination.
  4. Mise en place d’un comité technique impliquant les partenaires sociaux dans l’instauration d’un salaire minimum européen.
  5. Entreprendre des démarches communes au niveau européen pour parvenir à créer des systèmes d’assurance sociale flexibles et viables.
  6. Renforcement des systèmes de négociations collectives en tant qu’élément important dans l’établissement de salaires décents, mais aussi pour la phase future de mise en œuvre du socle européen des droits sociaux.