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Vers la mobilité équitable de la main-d’œuvre . Les questions sociales et de travail concernant les travailleurs migrants dans l’industrie de la construction dans les Balkans occidentaux et l’UE

Le séminaire portait sur le thème « Vers la mobilité équitable de la main-d’œuvre . Les questions sociales et de travail concernant les travailleurs migrants dans l’industrie de la construction dans les Balkans occidentaux et l’UE », était organisé par BIE Int. (Bouw-Industrie &Energie International), en coopération avec le Syndicat des travailleurs de l’industrie de la construction et des matériaux de construction de Serbie, et a eu lieu à Veliko Gradiste, en Serbie, du 25 au 27 mai 2021. Il était financé et soutenu par EZA et l’Union européenne et s’est déroulé dans le cadre du projet spécial d’EZA destiné aux organisations de travailleurs des Balkans occidentaux.

Trente-neuf participants ont assisté à ce séminaire hybride, qui s’est organisé via la plateforme ZOOM : des représentants d’organisations de travailleurs originaires des Balkans occidentaux et de l’Union européenne (de Belgique, des Pays-Bas, d’Autriche et d’Allemagne), des représentants du ministère de l’Intérieur de la République de Serbie, du Ministère du travail, de l’emploi, des vétérans et des affaires sociales, l’Inspection du travail de la République de Serbie, des organisations non gouvernementales et des experts engagés dans les problèmes des travailleurs migrants et la lutte contre la traite des êtres humains.

Au sein de l’UE, le marché intérieur est un marché unique. Depuis sa création en 1993, le marché unique s’est davantage ouvert à la concurrence, a créé des emplois et a réduit de nombreux obstacles au commerce. Les prestations transfrontières de services font partie intégrante du marché intérieur et ont offert de nombreuses nouvelles possibilités aux entreprises et aux travailleurs. Cependant, tous les effets ne sont pas positifs. En particulier dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, tels que l’industrie de la construction, elles ont également contribué à une augmentation de la fraude sociale et du dumping social. Il en résulte, d’une part, une concurrence inégale pour les entreprises et l’exploitation des travailleurs, d’autre part. Cela a placé les syndicats sectoriels de l’industrie de la construction devant de nombreux défis, notamment la manière dont ils peuvent protéger les droits des travailleurs et garantir des emplois décents pour tous. De ce fait, le séminaire a principalement porté sur la situation et le statut des travailleurs migrants et sur les défis auxquels la société est confrontée.

Les conclusions suivantes ont été adoptées au cours du séminaire :

1.       En raison de l’exode intensif de jeunes travailleurs instruits et qualifiés, les pays des Balkans occidentaux sont confrontés à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans le secteur de la construction. Il est nécessaire d’exiger de l’État une politique budgétaire stimulante et de rendre impérative l’augmentation des salaires dans le secteur de la construction.

L’exemple le plus frappant est la région orientale de la Serbie, où une personne en âge de travailler sur trois travaille à l’étranger. En raison de l’exode des jeunes travailleurs qualifiés, la Serbie a également été contrainte d’attirer des travailleurs migrants pour certains types d’emplois afin de faire rouler l’économie.

2.       Le nombre de personnes capables de travailler diminue et l’âge de la retraite augmente, d’où la nécessité de réformer le système d’assurance retraite et de pension d’invalidité en raison du grand nombre de personnes âgées qui ont besoin de soins et d’assistance.

.3.      En raison du manque de travailleurs locaux, on a besoin de travailleurs étrangers qualifiés. Cependant, nous assistons à un afflux de travailleurs non formés et à une augmentation de la tendance au travail illégal.

4.       Les principaux problèmes rencontrés par les travailleurs migrants sont définis comme suit : manque de compétences linguistiques locales, méconnaissance du cadre législatif local et de leurs droits, manque de logement décent et mauvaises conditions de vie et de travail ; le travail illégal, le non-paiement des salaires et le fait d’empêcher les représentants syndicaux de contacter les travailleurs migrants.

Pour la réalisation de projets de construction, les entreprises chinoises et turques font venir leurs travailleurs/main-d’œuvre locaux, qui sont pour la plupart non enregistrés et embauchés pour une période limitée. Ces entreprises embauchent également des sous-traitants non professionnels avec des travailleurs non qualifiés, ce qui entraîne une mauvaise qualité de la construction et des accidents du travail plus fréquents et plus graves.

5.       Formation et instruction des travailleurs migrants, ainsi que développement et mise en œuvre des outils tels que des panneaux linguistiques universellement compris sur les chantiers de construction pour surmonter les obstacles à la communication, en suivant la pratique et l’expérience de collègues syndicalistes aux Pays-Bas.

6.       Grâce aux activités conjointes du Ministère de l’intérieur, l’inspection du travail, les organisations non gouvernementales et les syndicats s’efforcent d’informer les travailleurs migrants sur la manière de contacter les autorités et les institutions compétentes qui peuvent les protéger, ainsi que de sensibiliser la population locale à la question du travail illégal et de l’exploitation du travail. À cet égard, il faut promouvoir la création de centres de services à guichet unique pour les travailleurs migrants et leur famille.

Les travailleurs exploités sont soumis à des restrictions de déplacement, voient leurs documents confisqués, vivent dans des conditions médiocres et insalubres, sont exposés à des menaces, au chantage et à la peur pour leur santé et leur vie, à des châtiments corporels et travaillent plus de douze heures par jour dans des tâches pour lesquelles ils n’ont pas été embauchés à l’origine.

7.       Exiger l’application de conventions collectives qui prévoient les mêmes conditions et les mêmes droits pour tous (aux travailleurs locaux et aux migrants), et la prévention de l’emploi des enfants, ainsi que le respect de la Convention 143, qui réglemente le travail des migrants pour éviter l’exploitation des travailleurs migrants, et l’introduction de sanctions sévères en cas de non-respect.

8.       Exiger le contrôle strict des agences (agences de travail intérimaire) traitant de l’emploi des travailleurs migrants et la mise en œuvre d’un cadre législatif afin d’éliminer les pratiques de recrutement illégales (fausses offres d’emploi, dumping social, confiscation de documents, etc.)-

Le non-paiement des salaires est l’un des problèmes les plus récurrents, rendu possible par la non-application des réglementations, ainsi qu’entre autres, par le manque de transparence de la chaîne de sous-traitance et les pratiques illégales des agences de travail intérimaire.

L’avantage concurrentiel fondé sur l’exploitation des travailleurs et les violations des droits de l’homme fragilise la cohésion de la société. La protection des droits des travailleurs migrants est un moyen d’empêcher le dumping social. Les travailleurs migrants doivent avoir les mêmes droits que les travailleurs domestiques, être organisés en syndicats et couverts par les conventions collectives.

9.       Il est nécessaire de mettre en place des accords bilatéraux de coopération entre les pays pour surveiller les activités et la situation des travailleurs migrants. Les inspections nationales du travail devraient travailler ensemble, et l’ELA devrait aider à la coordination à cet égard.

Avant d’aller travailler dans un autre pays et d’accepter des emplois annoncés en ligne, il est nécessaire que les travailleurs soient informés aussi précisément que possible des conditions de travail, du lieu de résidence et du type de travail, car il arrive souvent que la situation de fait sur le lieu de travail ne corresponde pas à l’accord.

10.     Promouvoir et fournir les ressources nécessaires pour former, renforcer et améliorer les compétences et les capacités des inspecteurs du travail. Renforcer la coopération entre les organismes de contrôle et les syndicats, au niveau local et européen.

La migration de main-d’œuvre est inévitable. Cependant, cette partie de la population est trop souvent maltraitée et stigmatisée, et une classe de travailleurs avec des salaires et des conditions de vie indécents s’est formée et continue de se former. Nous plaidons en faveur d’un salaire égal à travail égal. L’accueil et l’intégration des réfugiés, des migrants et des travailleurs détachés ne peuvent fonctionner que si des approches politiques sont adoptées qui préconisent une croissance durable de l’emploi. L’arrivée de nouveaux travailleurs sur le marché du travail n’aura un impact positif sur l’économie et la société que si l’intégration a lieu selon des normes efficaces et dans des conditions équitables.

Les séminaires de ce genre sont d’une grande importance pour l’ensemble de la région en termes de formation et de définition d’objectifs à court et à moyen terme, afin de surmonter les défis rencontrés sur le terrain et de garantir un travail décent à tous les travailleurs.

Les participants expriment leur gratitude à l’UE et à l’EZA ainsi qu’à l’ACV-BIE qui ont financé et soutenu ce séminaire sur le plan organisationnel.