EZA MAGAZINE
EZA PODCAST

La lacune de protection pour les travailleurs migrants dans l'UE

Du 19 au 20 octobre 2017, un séminaire portant sur les « La lacune de protection pour les travailleurs migrants dans l'UE », organisé par EUROMF, avec l’aide financière d’EZA et de l’Union européenne, s’est déroulé à Bucarest. Le séminaire faisait partie de la coordination du projet d’EZA sur « L’intégration des migrants et des réfugiés au marché du travail – le rôle des organisations de travailleurs ».

Il y a deux ans, le 1er et le 2 octobre 2015, au cours de notre séminaire, nous nous sommes penchés sur le flux migratoire et ses conséquences pour les pays d’accueil et les pays d’origine. Les lectures et les discussions ont rapidement montré que nous devions nous attarder sur les conditions de travail et de vie des travailleurs migrants au sein de l’Europe et sur les effets sur leurs familles, et spécialement sur les enfants laissés derrière. Nous avons alors organisé ce séminaire pour approfondir et élargir nos connaissances.

Marianne Thyssen (Commissaire européenne pour l’emploi, les affaires sociales, les compétences et la mobilité) a parlé à ceux qui étaient présents par le biais d’un message vidéo. Elle a étudié les propositions de l’UE qui devraient être la première étape de l’amélioration et elle a souhaité un séminaire productif aux participants.

Maria Mihaela Darle (Chef de service social CARTEL ALFA) a ouvert le séminaire avec un premier défi. Elle nous a averti de de la nécessité de donner également une voix dans le dialogue social aux travailleurs étrangers via les syndicats, mais elle a aussi soulevé la question de savoir comment ces travailleurs pouvaient être motivés à les rejoindre.

Dirk Coninckx (ACV Union de la construction et de l’industrie, Belgique) a démontré dans sa lecture l’ingénuité des systèmes complexes mis en place pour exploiter les travailleurs européens orientaux dans la construction européenne occidentale et les entreprises de transport, en les sous-payant et en les excluant de la sécurité sociale. Les travailleurs migrants ayant eu un accident sont alors souvent littéralement jetés à la rue. Des témoignages vidéo de chauffeurs de camion ont été ajoutés à l’authenticité de cette présentation.

La province belge du Limbourg a une longue histoire de migrations des travailleurs, qui étaient principalement des mineurs au début. Erwin De bruyn (Stebo) a souligné comment le Gouvernement avait d’abord joué un rôle constructif en accordant la sécurité sociale et l’hébergement et comment cela avait conduit à l’amélioration rapide du sort des immigrants. Cependant, durant ces dernières décades, les autorités restent complètement à la traîne et les conséquences de cette attitude sont néfastes, comme on peut le voir, entre autres, dans les logements lamentables de ces nouveaux travailleurs migrants.

La contribution universitaire a été fournie par Johan Wets qui, en qualité de chercheur connecté à l’UC HIVA de Louvain, a déjà étudié très soigneusement ce sujet. Présentant de nombreux chiffres et de nombreuses données, il a donné un aperçu du flux migratoire qui augmente constamment et il a montré que si l’on regardait les divers pays, parmi ceux-ci, on remarquait des tendances à la fois en hausse et en baisse. Il s’est aussi penché sur la question difficile, visant à donner une définition claire des travailleurs migrants. Ou, d’autre part, sont-ils souvent simplement des travailleurs européens ? Les motifs ont été analysés et le manque de politique a été exposé.

Les lectures du premier jour se sont terminées par un aperçu de la réalité quotidienne roumaine fourni par Cristina Chert (coordinatrice du réseau ouvert en Roumanie – un développement communautaire soutenu par une ONG) qui collabore au programme de recherche européen RE-InVEST. Elle a expliqué les raisons de la migration, l’exode des villages et ses conséquences, tout en observant qu’entre-temps, un courant de retour important avait pris naissance.

À l’aide du nombre d’exemples, cette conférencière nous a permis d’envisager comment regarder ces gens. Sont-ils des parasites, des victimes ou des survivants ?

Dans l’atelier final, on a passé beaucoup de temps à assimiler les contenus des lectures de manière participative et interactive, la recherche axée sur les objectifs pour des propositions spécifiques visant à élargir encore la politique sociale européenne. Le fil rouge à cet égard est sûrement la nécessité de fournir les moyens nécessaires à l’échange d’informations permanent sur la migration et les conditions de travail et de vie associées à travers les frontières nationales.

Le vendredi 20 octobre, toute l’attention s’est focalisée sur les familles et spécialement sur les enfants laissés derrière. Cette partie du séminaire a été lancé par la présentation de Ilze Trapenciere (chercheuse de l’Institut de philosophie et de sociologie, à l’Université de Lettonie). Elle en a dit long sur les conséquences pour les enfants laissés derrière et l’influence sur leur éducation et leur scolarisation. Elle a également mentionné quelques initiatives positives. Sa présentation a été complétée par la délégation ukrainienne qui a ébauché le problème dans son pays, tout en déclarant qu’elle avait aussi fait l’expérience que si les parents pouvaient retourner régulièrement dans leurs familles, beaucoup moins de problèmes pouvaient être identifiés. La délégation slovaque a également contribué au sujet en expliquant la migration en provenance de son pays.

Dr. Annik Lampo (chef de service de l’enfant et de la psychiatrie de l’adolescent) a décrit, en se basant sur son travail et sa recherche journaliers, les conséquences pour les enfants laissés derrière par leurs parents travaillant à l’étranger. L’importance des liens affectifs et d’être ensemble a été savamment soulignée et clarifiée dans la perspective psychiatrique. Cette conférencière a aussi souligné l’importance de créer des possibilités, de créer des opportunités de contact étroit grâce au retour régulier. Le fait d’avoir des conversations vidéo n’étant pas une solution véritable.

Arktos vzw est une ONG belge qui a une expérience considérable dans l’abord des jeunes et des enfants qui sont quelque peu abandonnés par l’école, les parents et le système. En se basant sur l’expérience pratique, Dirk De Rijdt explique comment lui et ses collègues suivaient néanmoins une trajectoire positive, étape par étape, en abordant les jeunes les plus difficiles. C’est un essai et un processus d’erreur impliquant que l’on y accorde beaucoup de confiance. La manière la plus efficace de continuer est de faire en sorte que les jeunes commencent par ce qui les motive.

Le deuxième jour a été également clôturé par un atelier plénier, au cours duquel, en se basant sur le contenu des lectures, un certain nombre de propositions constructives ont été rédigées. Le fil rouge était sûrement la reconnaissance de l’importance de l’abord du problème des enfants laissés derrière et de faire des propositions à l’UE pour qu’elle lance certainement une politique sur ce problème. Entre autres choses, cela pourrait être réalisé en redoublant d’efforts dans les pays d’accueil pour garder ensemble les familles des travailleurs migrants.

Propositions du séminaire plénier : Les conditions de travail et de vie pour les travailleurs migrants (intereuropéens)

• Améliorer la législation afin d’éviter la sous-traitance, ce qui facilitera à son tour le contrôle des entreprises.

• Améliorer les lois et faire des lois au niveau européen, rendant plus facile la mise en place de syndicats, spécialement pour les pays dans lesquels les réglementations ne permettent la mise en place de syndicats que dans les petites entreprises après l’atteinte du nombre minimum de membres dans cette entreprise.

• Nécessité de penser à long terme : par conséquent, partout, nous avons besoin d’un dialogue social réel.

• Impliquer la société civile et les syndicats pour forcer ceux qui sont au pouvoir politique à mettre en place des interventions significatives et non seulement à légiférer.

• Échanges entre les syndicats dans tous les pays de l’UE, de manière à partager les informations sur les travailleurs migrants et les conditions avec le support linguistique fourni. Également, implication des travailleurs migrants dans les syndicats pour combler les manques de communication et aider les travailleurs étrangers.

• Les connaissances de la situation réelle de chaque pays individuel devraient être considérées comme positives.

• L’instruction est la clé de la construction et du développement de l’égalité des chances pour tous les travailleurs migrants, qu’ils soient des travailleurs de l’UE ou des travailleurs hors UE.

• Plus d’informations et recherche sur l’impact de la « Fuite des cerveaux ».

• Impact négatif des agences de recrutement dans la dénaturalisation du marché du travail.

• Développement d’une base européenne commune partagée de données numériques (les détenteurs sont des personnes/organismes sociaux sans but lucratif) sur les questions spéciales :

-la législation du marché du travail

-les droits/responsabilités

-les systèmes de sécurité sociale

• L’UE doit continuer à sensibiliser les citoyens européens à donner des informations et à communiquer. = clé et pouvoir.

• Une sécurité de travail égale commune comme base de sécurité sociale égale commune.

• Une plus forte coopération internationale et la coordination pour un marché du travail équitable (emploi).

Les parties prenantes sont :

            - les gouvernements

- les syndicats

- la société civile

- les employeurs (secteur des affaires)

• Une information précise sur la migration et les circonstances/conditions est nécessaire et nous avons besoin d’empathie (avec les survivants ou les victimes).

• La solidarité européenne :

- stimulée par la société civile européenne qui doit collaborer

- propulsée par une sécurité sociale suffisante pour tous

• Europe = 1 pays. Y CROIRE !

• Deux groupes d’enfants dans cette proposition. Premièrement, les enfants venus comme réfugiés sans

leurs parents (enfants non accompagnés). Les états devraient être responsables pour ces enfants : éducation et protection.

Deuxièmement, les enfants laissés derrière dans leur pays natal. Des projets doivent être mis en place, dans les écoles ainsi que dans l’éducation. L’Europe doit partager les coûts et devraient soutenir financièrement les écoles, mais aussi créer des possibilités de mobilité permanente pour les parents. Les parents doivent avoir la possibilité de rentrer chez eux tous les deux ou trois mois.

• Nous avons besoin de plus d’investissement en Europe parce que cela signifie investir dans l’avenir. Aussi plus d’investissement dans l’éducation parce qu’il est question de la nouvelle génération. Doit être une politique européenne commune avec des projets communs. (Pas trop d’administration, pas de Kafka.)

• Nous avons besoin de coopération transfrontalière (pays d’origine et pays d’accueil) dans les domaines tels que :

- la taxation (travailleurs légaux + travailleurs illégaux),

- le marché du travail,

- l’éducation,

- la santé et la révolution de la santé mentale.

• Le problème des enfants laissés derrière ou restant avec leurs parents doit être abordé par une politique européenne commune avec beaucoup plus d’investissement dans l’éducation dans tous les pays. Focus sur l’approbation des possibilités pour les enfants de quitter leur pays ensemble avec leurs parents. Apprendre des bonnes pratiques dans plusieurs pays. Cela signifie qu’il faut repenser l’investissement dans l’éducation, la pensé créative concernant la conscience de l’argent et de l’investissement. Nous avons donc besoin d’équipes et de compétences mélangées.